Instagram : êtes-vous rinsta ou finsta ?
Le nom de l’application Instagram vient de la fusion des termes « photo instantanée » et « télégramme ». Créé à San Francisco en 2010 par deux diplômés de Stanford, Kevin Systrom et Mike Krieger, l’application a rapidement rencontré un grand succès. Mais son usage ne répond plus en rien à son étymologie. D’une certaine manière, Instagram est l’innovation de service de la Société du Spectacle, tant cette application a transformé la façon de se représenter et de partager son image. Les adeptes distinguent maintenant le vrai (real) insta et le faux (fake) insta. Ou font semblant de le faire.
Les adeptes distinguent maintenant le vrai (real) insta et le faux (fake) insta. Ou font semblant de le faire.
’instantané n’est plus très spontané. Les attrape-like relèvent souvent de la fiction et du théâtre. Ces photographies sont des marqueurs sociaux, au point qu’aujourd’hui, on peut choisir un lieu de vacances selon les critères d’Instagram. D’ailleurs, des hôtels, des restaurateurs, des musées et des expositions en font un argument de vente. L’esthétique du lieu est le premier point d’entrée. Il existe des listes : le « top 50 most instagrammables cities » ou les «50 Most Instagrammable Tropical Islands In The World ». La dimension authentique a été perdue. Certains prévoient à l’avance où aller pour prendre les plus belles photos.
Des entreprises proposent désormais de louer des faux décors de luxe le temps d’un shooting photo pour les influenceurs.
Et ça marche : l’apparence d’une vie de luxe fait grimper en flèche le nombre d’abonnés. Plusieurs influenceurs et youtubeurs en ont fait l’expérience. C’est le cas du youtubeur londonien Byron Denton. Pendant une semaine, il s’est affiché avec des faux sacs Louis Vuitton, ou encore dans un décor de jet privé. Alors que toutes ses publications étaient photoshoppées, en l’espace de quelques jours, cette fausse vie a attiré des centaines de likes, commentaires et des nouveaux abonnés, qui eux, sont bien réels. On le savait déjà, mais cette expérience montre à quel point il est possible de manipuler les foules.
Toutefois, une nouvelle tendance émerge chez les ados : les “finsta” (fake + instagram).
Leurs propriétaires y postent des éléments de leur vraie vie. Ils choisissent des éclairages naturels. Oubliée la Ringlight qui rend la peau plus belle et le visage plus lisse. Ces finsta n’ont pas pour but de faire rêver, mais elles incarnent la vraie vie. Un petit cercle d’amis y a accès. Le trucage a créé des habitudes de jugement du beau. Et le réel ne parait plus toujours beau à voir. Il n’est pas pourtant question de se déshabituer des filtres. Ces photographies sont curieusement qualifiées de “fake”. Rêver sa vie serait donc la vérité affichée, celle du Rinsta (real instagram).