Économie : doper c’est tricher?
En juin 2019, un article du Dauphiné titre “Le cannabis pour doper l’économie”. Le jeu de mot n’est apparemment pas volontaire. En effet, ces dernières années, le terme “doper” a été utilisé plus fréquemment dans un contexte économique. Ce glissement pourrait bien être un révélateur d’une obsession pour la performance.
Doper, c’est administrer un stimulant, bien souvent dans le but d’améliorer une performance physique ou intellectuelle. Pratique réprimée dans le domaine sportif, certaines disciplines sont tristement célèbres pour le recours de participants à des substances dopantes. On pensera par exemple au cyclisme, qui s’est illustré par des affaires très médiatisées comme celle du coureur Lance Armstrong, 7 fois vainqueur du tour de France avant d’être finalement destitué de ses victoires pour dopage.
Le culte de la performance, physique comme intellectuelle, et la pression sociale provoquent en grande partie la consommation de produits dopants.
Mis face à une obligation de résultats, les individus deviennent prêts à tout pour atteindre leurs objectifs. Des stéroïdes pour les bodybuilders à la cocaïne pour les banquiers, à chaque profession son stimulant, rarement légal.
Par glissement, le mot “doper” en est venu à désigner dans le domaine économique ce qui augmente la puissance ou le rendement.
Cet emploi n’est pas hasardeux, puisque l’économie est précisément le lieu de la mesure constante de la performance. On parle de “doper” les chiffres, la productivité ou de la croissance. Mais ces usages semblent évacuer l’aspect potentiellement artificiel de cette pratique.
Le vocabulaire a gagné la sphère privée. On lira des articles proposant de « doper » son quotient familial ou de « doper » ses revenus à la retraite.
Ce nouvel usage du dopage est révélateur d’une obsession contemporaine pour la performance. Les paradis artificiels ont partie liée avec les paradis fiscaux. Mais le paradis existe-t-il? C’est ainsi que les bulles éclatent.