Le 2 décembre 2019

Le selfie : image de soi ou reflet de l’entre-soi ?

Le selfie a été créé en 2004 par le site de partage de photos Flickr. Depuis, des milliards de photos sont prises et publiées dans le monde entier. Des photos de voyage, des clichés du quotidien, seul ou à plusieurs, spontanés ou travaillés, retouchés, filtrés. Si l’autoportrait a toujours existé, en photographie et en peinture, il a connu un essor avec l’avènement du réseau social Instagram et la facilité du partage de photos via Snapchat ou Messenger. En 2010, les développeurs d’Apple ont ajouté une caméra frontale à leurs produits. Le dictionnaire Oxford l’a élu mot de l’année en 2013.

La particularité du selfie ? Une photo de soi-même… par soi-même, à bout de bras ou face à un miroir.

Le selfie révèle la part de narcissisme de chacun. Poster ces photos n’est plus seulement un moyen de partager des moments de vie. Ces autoportraits apparaissent comme un outil pour booster l’ego et l’estime de soi. Ce phénomène s’inscrit dans la course aux likes et à la performance, voire même explique une part de l’engouement pour les publications de développement personnel.

La “reine des selfies”, c’est Kim Kardashian. En 2015, elle a publié un “livre de selfies”, appelé Selfish, contenant uniquement des selfies, dont certaines déjà publiées sur son compte instagram.

Des bloggers écrivent des articles apprenant “Comment réussir un selfie parfait”. Le caractère spontané du selfie disparaît. Mais qu’est-ce que la perfection ? Le selfie permet de contrôler son image. Choisir le cadre et les angles, retoucher et poster : l’auteur du selfie reste maître de lui-même. Le croit-il ?

Au-delà de tout ce qu’on peut dire sur la part égotique du selfie, là n’est peut-être plus l’essentiel, à l’heure où se déploient des algorithmes d’analyse des visages et des émotions.

Faussement démonstrateur d’une activité sociale sur-active, il renvoie une représentation de soi qui correspond à la norme, aux diktats et aux attentes de la communauté d’appartenance. En images, la démonstration, à une échelle mondiale de ce que Jérôme Fourquet appelle L’Archipel français.